Le marché des obligations d’Etat vertes libellées en euro se stabilise

Patrick Aussannaire
Responsable Relations Emprunteurs publics CAPVERIANT
24 février 2023
L’expansion des volumes sur le marché primaire semble terminée
Sur le marché primaire, les volumes émis par les Etats et administrations publiques supranationales, sous-souveraines et d’agences (SSA) ont démarré fort avec 41 milliards d’euros d’émissions d’obligations vertes, sociales et durables depuis le début de l’année qui dépassent celles des deux premiers mois de toutes les années précédentes. Si le marché a connu une forte croissance depuis 2019, il semble néanmoins entré dans une phase de maturité. Les émissions avaient déjà reculé l’année dernière par rapport au pic atteint en 2021 notamment grâce aux émissions d’obligations sociales liées aux pandémies. Le seuil des 200 milliards d’euros dépassé en 2021 reste donc en ligne de mire pour cette année, dans le cas d’une reprise de la croissance dans l’espace souverain et SSA libellé en euros interrompue l’année dernière. Une stabilisation des volumes indiquerait cependant que le marché se stabilise et est déjà devenu mature, comme le pensent les analystes d’ING.

En ce qui concerne les govies, une certaine croissance du marché pourrait résulter de plans de financement globalement plus élevés dans la zone euro, les principaux émetteurs de l’administration centrale ayant mis en place un programme d’obligations vertes, la possibilité d’une plus grande poussée à court terme semble limitée. Pour cette année, les marchés ne voient que la Grèce comme nouvel entrant. En ce qui concerne l’Afrique subsaharienne, l’Union européenne devrait rester le principal moteur des émissions d’obligations vertes liées au programme NextGenerationEU (NGEU). Nous n’avons pas encore vu la première opération dans ce domaine, mais l’objectif déclaré de lever 30% des financements à long terme par le biais d’obligations vertes, en extrapolant à partir du plan de financement de 70 milliards d’euros du premier semestre 2023 de la NGEU, laisse déjà entrevoir quelque 40 milliards d’euros d’émissions vertes pour la seule UE cette année.
L’année 2022 a mis fin à l’idée répandue selon laquelle les obligations vertes devraient automatiquement se négocier à un rendement inférieur à celui de leurs homologues dites classiques, et ceci malgré une amélioration des conditions de liquidités sur le marché. Si l’intérêt des green bonds reste de mise en moyenne, la prime sur la courbe des taux souverains en euros a diminué au quatrième trimestre de l’année dernière, et la prime médiane sur les six plus gros émetteurs souverains en euro est passé d’environ 4 points de base (pb) aux deuxième et troisième trimestres 2022, à 3,8 pb au quatrième trimestre, puis à 3 pb depuis le début de l’année 2023 selon les calculs d’ING.

Un marché qui a trouvé son point d’équilibre ?
Après des années où la demande dépassait l’offre, le démarrage relativement fort de l’activité d’émission pourrait avoir permis aux prix de trouver une sorte d’équilibre. Les conditions plus difficiles du marché primaire et la hausse de la prime de nouvelle émission ont entamé la prime au green sur les marchés primaires, et par conséquent sur les courbes secondaires également.
Le marché des obligations vertes souveraines européennes semble tendre vers les primes offertes sur le secteur des SSA où un grand nombre d’obligations vertes sur la courbe d’un émetteur apporte un certain degré de stabilité dans la tarification. Pour les deux plus grands émetteurs historiques, la BEI et la KFW, la prime aux green bonds a oscillé juste en dessous de 0 pb. L’Union européenne est relativement nouvelle sur ce marché, le rendement offert est désormais moins élevé que les obligations non vertes ((positif sur le graphique ci-dessus, indiquant un rendement plus élevé que les obligations non vertes). Cela peut être le reflet de l’augmentation des émissions prévues dans les trimestres à venir.